La Légende du Fil Des Mots


Il y a bien longtemps, avant la prime aurore,
Le mot dès son berceau devint la clé de tout,
Et l’aimant aussitôt, on le flatte on l’adore
Mais il n’obéit pas car il est un peu fou.

 

Le verbe, l’adjectif, le coordonateur,
À se lier au nom ont tache difficile
Il faudrait un aimant subtil relieur
Pour rendre cohérent l’assemblage fragile.

 

On a beau accoler des mots en pyramides
Ou en icosaèdres voire en banal amas
En lisant relisant, de sens ils restent vides
Ce ne sont que des riens que l’on a mis en tas.

 

La chose chagrina des fées de l’univers
Qui vivaient tout au bord d’un trou noir didactique
Afin de faire cesser un tel effet pervers
Elles donnèrent aux mots la juste sémantique.

 

Deux sorcières furent nommées l’une était Lexica
L’autre Grammairounette ; attachées au labeur
Elles plantèrent des graines d’un arbre délicat
Elles avaient verte main, il grandit en douceur.

 

On récolta alors, on carda, on fila
Le rouet magicien allait un train du diable
On obtint un lien supprimant les tracas
Le Fil Des Mots naquit rendant la langue aimable.

 

Mais les sorcières, aimant des humains se moquer,
Rendirent bien ardu notre vocabulaire
Et mettent, par moment, pour nous interloquer
La fève-traquenard en galette-grammaire.

 

L’écriture plaisant à d’agiles esprits
On vit s’associer des plumes encrivores
Des groupes devenant un peu plus érudits
Noircissaient du papier des brunes aux aurores

 

Ils mirent sur leur boutique un simple panonceau :
“Au Fil Des Mots” est fait pour vous donner envie
D’extraire de la langue ce sublime cadeau
De l’écrit bien pensé sa lecture ravie.

 

Jean-Pierre Armandou XIX 09 MMXII